La communauté des Chinois de l’étranger victime de la répression visant les transfert

Les autorités nord-coréennes ont intensifié leurs efforts
pour juguler le flot d’argent entrant dans le pays depuis la Corée du Sud.
Auparavant limitée à la surveillance et au contrôle des familles de transfuges
et des courtiers, qui facilitent les transferts d’argent liquide du Sud vers le
Nord, la répression s’est désormais étendue aux hwagyo (la communauté chinoise
de l’étranger) résidant en Corée du Nord.

Une source de la province de Hamgyŏng du Nord a précisé à
Daily NK le 25 septembre que « des hwagyo sont régulièrement
interrogés par des agents du ministère de la Sécurité d’État (MSE), parce qu’on
les soupçonne d’être impliqués dans le transfert d’argent des transfuges
résidant au Sud vers leurs familles restées au Nord. »

Les montants envoyés par les transfuges à leurs familles se
sont accrus depuis l’apparition de cette pratique ces dernières années. Ces
ressources supplémentaires ont substantiellement permis auxdites familles de
s’en sortir et, dans certains cas, de monter leur propre affaire.

Les inégalités économiques croissantes et l’agitation
sociale provoquées par ces flux d’argent ont conduit les autorités à prendre
des mesures radicales. Elles ont ainsi renforcé la surveillance des familles
des transfuges et, dans certains cas, en ont même déporté dans des régions
reculées du pays.

Toutefois, le fait d’étendre le contrôle aux hwagyo demeure
sans précédent, et démontre la détermination des autorités à écraser quiconque
est considéré comme lié à ces transferts d’argent. Les hwagyo sont traités
comme les citoyens nord-coréens. Ils possèdent les mêmes papiers d’identité,
mais peuvent en outre détenir un passeport chinois, qui leur permet une plus
grande mobilité et une plus grande autonomie que le commun des Nord-Coréens.
Cette situation a certainement déclenché les soupçons du MSE quant à leur
implication potentielle dans ce trafic.

À mesure que le phénomène des familles recevant des fonds de
proches réfugiés en Corée du Sud s’étend dans l’intérieur du pays – n’étant
plus seulement contenu aux zones frontalières – les autorités ont élargi les
contrôles aux membres mêmes du MSE et des forces de sécurité.

« La répression relative aux transferts de fonds en
provenance du Sud a débuté l’année dernière », indique la source.
« Initialement, ils contrôlaient et punissaient surtout les familles de
transfuges, mais désormais, ils visent également ceux qui ne font
qu’aider. »

La source ajoute que certains hwagyo interrogés par des
agents du MSE se sont ouvertement plaints. « J’ai juste été
l’intermédiaire. Qu’y’a-t-il de mal à ce que l’argent entre dans le pays ?
Quelle différence cela fait-il si quelqu’un le transmet ? Au final, ça
bénéficie aux Nord-Coréens, pas à nous. »

Des agents du MSE tentent d’obtenir des hwagyo les
déclarations les plus complètes possibles. « Avez-vous reçu de l’argent
illicite ? Avez-vous eu des contacts avec des Coréens du Sud lors de vos
échanges et si oui, de quoi avez-vous discuté ? », sont des exemples
de questions posées lors des interrogatoires, selon la source. D’autres agents
adoptent une attitude plus passive et manipulatrice, avertissant les hwagyo de
« faire attention, si quelqu’un veut transmettre de l’argent. »

À mesure que la répression se déroule, certains Nord-Coréens
notent qu’ « il n’y a probablement pas un membre du MSE qui n’ait pas reçu
une part de ces transferts d’argent », ajoutant que ce sont eux, pas les
citoyens, qui devraient être les premiers ciblés et interrogés.

Il n’est pas rare que les agents du MSE en poste sur la
frontière perçoivent sous forme de pots-de-vin pour fermer les yeux une partie
de l’argent introduit illégalement dans le pays. Pour une raison simple :
malgré les rations potentiellement plus importantes et plus régulièrement
distribuées auxquelles ils ont droit, ces dernières, couplées à leur salaire
dérisoire, ne permettent pas à la plupart desdits agents de subvenir à leurs
besoins essentiels.

Certains supposent que la répression opérée à l’encontre des
hwagyo serait une tactique utilisée par des officiels du MSE des régions
frontalières ayant vu disparaître le système de pots-de-vin dont ils
bénéficiaient auparavant grâce à la contrebande et aux défections. D’autres
émettent l’hypothèse que les autorités s’en prennent aux hwagyo, qui ont une
situation financière plus stable dans le pays, afin de percevoir plus de
pots-de-vin.

Beaucoup acceptent rapidement la réalité de la situation
explique la source, qui ajoute, en citant un tiers, qu’ « il se peut
qu’ils n’aient pas le choix de mener ces opérations de contrôle parce que c’est
un ordre qui vient d’en haut. C’est la loi ici, de faire comme on te dit de
faire, et c’est ce à quoi les agents du MSE doivent faire face. »